Plus qu’une gibbosité dorsale cancéreuse traînée par le poids des âges, le statut de la femme n’a pas toujours été des plus reluisants. De la simple chosification à l’animalisation, elle a souventes fois été perçue comme « un être entièrement à part et non à part entière ».
Hier et ailleurs, elle était l’objet d’une phallocratie artistiquement maladroite, même au cœur de la péninsule arabique ou à l’époque antéislamique, sa venue au monde distillait le sardonique venin de l’opprobre.
Des ténèbres
à la lumière comme un hymne de gloire triomphale, l’islam par l’avènement du
Messager Mouhammad (saw) lui restituait toute la splendeur et la plénitude de
son être. Tel un diamant cristallin libéré des entrailles d’une roche obscure,
elle pouvait enfin distiller ses sublimes réverbérations.
LA DIGNITÉ RESTAURÉE
À l’époque
antéislamique, la femme était un instrument du dicta et du machisme des hommes.
Les arabes la considéraient comme une créature improductive et poussaient le
bouchon de leur misogynie si loin qu’ils s’offraient le cynique loisir de
l’enterrer vivante à sa naissance. Aussi, ceux qui parvenaient à le faire s’en vantaient
publiquement.
Ces
croyances saugrenues seront balayées par l’ouragan libérateur de l’islam à
travers l’interdiction formelle de cette pratique. « Et lorsqu’on annonce à
l’un d’eux une fille, son visage s’assombrit et une rage profonde [l’envahit].
Il se cache des gens, à cause du malheur qu’on lui a annoncé. Doit-il la garder
malgré la honte ou l’enfouira-t-il dans la terre ? Combien est mauvais leur jugement
!», S16 V58-59.
Et le
Prophète Mouhammad (saw) de renchérir : « Celui qui a une fille et qui ne
l’enterre pas vivante, qui ne l’insulte pas et qui ne favorise pas son fils sur
elle, Dieu le fera entrer au paradis ». Hadith mis en évidence par Ahmad Ibn
Hanbal.
La femme est
mise dès lors sur le même piédestal que l’homme, sortant ainsi de la prison
angoissante de la chosification pour occuper la place qui est la sienne.
« Ô hommes !
Craignez votre Seigneur qui vous a créés d’un seul être, et a créé de celui-ci
son épouse […] », S4 V1. « En vérité, Je ne laisse pas perdre le bien que
quiconque parmi vous a fait, homme ou femme […] » S3 V195. « […] Aux hommes la
part qu’ils ont acquise, et aux femmes la part qu’elles ont acquise […] », S4
V32.
LE LEADERSHIP DE LA FEMME MUSULMANE
Dans toute
l’histoire de l’évolution de la communauté musulmane, il existe des femmes
chefs d’orchestre qui ont brillé par leur capacité à influencer positivement
des groupes et à canaliser les énergies dans tous les domaines de la vie sociétale.
Dans le
domaine politique, l’exemple de la reine de Saba passée maîtresse dans l’art de
la gestion de la chose publique est parlant : « J’ai trouvé qu’une femme est
leur reine, que de toute chose elle a été comblée et qu’elle a un trône
magnifique. », S27 V23.
Sur le plan
de la gestion managériale et économique, l’épouse du Prophète Mouhammad (saw),
la riche femme d’affaires charismatique Khadijat (raa) demeure une illustration
parfaite.
Le
leadership des femmes a aussi joui de toute sa noblesse dans le domaine du
savoir avec de célèbres érudites qui ont profondément influencé les mœurs et
les mentalités de leurs contemporains. Ce fut le cas de la savante Aicha (raa)
qui a été une véritable université pour une panoplie de savants musulmans après
le rappel au SEIGNEUR du messager d’ALLAH (saw). Des droits abondamment
proclamés et constamment violés.
UNE PLACE DE CHOIX À ASSUMER POUR S’ASSUMER
Quand bien
même l’islam la traite comme une perle diamantine des plus rares, et le
qualificatif ne saurait égaler la valeur du poids d’un atome de sa cheville, la
femme musulmane reste à la traîne même dans certains pays dits musulmans, ou à l’intérieur
de certains espaces familiaux.
À l’image du
cordonnier mal chaussé, les musulmans savent se vanter de la portée très fleuve
des enseignements islamiques sur le statut de la femme, mais le traitement que
certains leur réservent au quotidien reste à désirer.
En tout état
de cause, si le Saint Coran a proclamé solennellement la dignité et la grandeur
de la femme, ce n’est nullement pour de la simple littérature, mais pour lui
garantir la place de choix qui lui revient de fait et de droit.
Toujours
est-il que la femme musulmane, pour jouir de ces bonnes grâces proclamées, doit
aussi accepter de s’assumer pour assumer son destin.
« En vérité,
Allah ne modifie point l’état d’un peuple, tant que les [individus qui le
composent] ne modifient pas ce qui est en eux-mêmes. » S13 V11
C’est à la
femme de s’assumer pour assurer son leadership au sein de la société en
s’éduquant, se formant, s’informant, en ayant une vision claire et de « savoir
ce qu’elle va faire et garder l’équilibre entre le corps et l’esprit… », comme
le dirait Dr Tarek Suwaidan.
L’islam met
donc l’accent sur ses valeurs morales et spirituelles en tant que bergère du noyau
familial et leader ou actrice de développement. À ce titre, elle doit être au
même chef que l’homme, un modèle d’exemplarité, et faire preuve de pudeur et de
décence, de l’intérieur comme de l’extérieur.
En tout état
de cause, la lutte pour la valorisation de la femme ne doit pas être de son
seul ressort. Le Messager d’ALLAH (saw), en rapportant que « le paradis se
trouve au pied de nos mères », intimait aux hommes le devoir d’être
foncièrement bienveillant envers la femme. L’islam établit un ordre de complémentarité
entre elle et l’homme, et le meilleur d’entre eux est ainsi décrit : « Ô hommes
! Nous vous avons créés d’un mâle et d’une femelle […]. Le plus noble d’entre
vous, auprès d’Allah, est le plus pieux […] », S49 V13.
Le
leadership de la femme est aussi une quête au quotidien de cette part de
perfection de soi, de cette dimension de piété exaltée.
UN LEADERSHIP À PORTÉE DE MAIN
L’histoire
n’est pas seulement que d’hier. Elle est aussi d’aujourd’hui, où des femmes musulmanes
ont su se battre pour se hisser une place de choix au soleil d’un leadership « déféminisé
». Elles n’ont pas été ou ne sont pas que des « charrettes » pour les femmes.
Elles le sont aussi pour les hommes, les tirant sur les champs plantureux, y ensemençant
les graines fertiles, sublimant les efforts des hommes également.
De
l’engagement humanitaire au positionnement politique, des noms comme Cheikha
Lobna Al Qasimi, ministre du Développement et de la Coopération aux Émirats
Arabes Unis, classée par le magazine Forbes comme étant la 42e femme la plus influente
au monde dans la catégorie politique. On note également la princesse Lalla
Salma du Maroc, qui a bousculé le monde humanitaire dans les hautes sphères
internationales.
Ces exemples
indiquent bien que la femme musulmane n’est pas faite que pour assurer les
seconds rôles. Ces deux susmentionnées ont fait de grandes études dans de
prestigieuses universités avant de devenir des élites dans des contrées supposées
exagérément masculinisées.
Aujourd’hui
plus que jamais, la femme musulmane doit participer à la vie politique et
sociale de sa nation. Elle doit sortir de la victimisation et écrire les pages
de son destin avec les mêmes armes que les hommes et accorder une place de
choix à l’instruction et au savoir. Et l’islam lui en offre le cadre en faisant
de la recherche du savoir une obligation pour tout musulman.
Il ne sera
pas question de sacrifier la fonction de procréatrice ou de bergère de la
famille, mais de créer l’harmonie entre ces différentes obligations.
La quête de
cette affirmation de soi exige seulement d’elle un attachement sincère aux
valeurs islamiques, aux perceptions divines, un goût prononcé pour la pudeur.
La pudeur du point de vue de la forme par la valorisation de son corps à
extraire des regards voraces, mais aussi dans le fond par la préservation de sa
dignité, en cherchant à gravir tous les échelons de l’échelle sociétale à la
sueur de son labeur et non de son charme ensorcelant. Et ce qui importe, ce
n’est pas seulement ce que la femme porte sur le corps ou sur la tête, mais ce
qu’elle a dans la tête et dans le cœur.
Sans la
culture de cette pudeur, le leadership de la femme musulmane ne sera qu’une
coquille vide. Elle ne saurait être non plus un frein à son épanouissement, comme
le dirait Dalia Mogahed (directrice exécutive du département des études
islamiques du célèbre institut de sondages Gallup, ex-conseillère de Barack Obama
à la Maison-Blanche) : « Une fois que les gens me connaissent, je suis une
professionnelle pour eux, pas une femme en hijab [le voile islamique]. »
Nul doute
que «la pudeur fait partie de la foi et la foi conduit au paradis… »,
l’objectif in fine, étant la quête de l’agrément divin. Dis : « En vérité, ma
salāt, mes actes de dévotion, ma vie et ma mort appartiennent à Allah, Seigneur
de l’Univers. », S6 V 162.
L’esclavagisme
déshumanisant à visage féminin qui réduit la femme musulmane dans un rôle de
sous-homme, n’est qu’abjection de la révélation divine, une infamie contre les
droits élémentaires de la femme.
Du mariage
forcé au refus de la scolariser, tout dénote de la méconnaissance des textes
révélés et d’un phallocentrisme hérité de clichés culturels en ruine.
Et même là
où la marche est tenue par un homme leader, il y a toujours à ses côtés, cette
force tranquille qui l’aide, qui l’apaise, qui le console, cette douceur
contagieuse, cette consolatrice indéboulonnable, cette accompagnatrice fidèle,
cette source féconde de revitalisation des énergies, LA FEMME.
Seuls les
hommes de valeur savent lui reconnaître la grandeur qui est la sienne. Et le
Messager Mouhammad (saw) le disait si bien avec élégance dans ce hadit
authentifié par l’érudit Al Bâny : « Le croyant qui a la foi la plus parfaite
est celui qui a le meilleur comportement. Les meilleurs d’entre vous sont les
meilleurs avec leurs femmes ».
El Hadj Diabaté
Fousséni (journaliste-écrivain, contributeur)