Mon aventure avec l’univers des jeux vidéo commencée il y a treize ans, au Québec, m’a permis de beaucoup voyager et de poser mes valises aujourd’hui en Asie. Il ne faut Jamais abandonner car les bonnes choses prennent du temps.
L’on
pourrait facilement l’écouter toute une journée, sans se lasser, tellement il
sait communiquer sa passion du jeu vidéo. Pourtant rien ne le prédestinait à
devenir concepteur dans le divertissement : Quand j’étais au Lycée Scientifique
de Yamoussoukro, je rêvais d’être pilote d’avion.
Cette
passion pour l’aviation sera de courte durée. Arrivé en France pour les classes
préparatoires pour les grandes écoles d’ingénieurs je fus attiré tout de suite
par l’informatique, mais surtout par tout ce qui touchait les réseaux de télécommunication.
A notre époque, déjà en terminale, nous avons pu bénéficier grâce aux autorités
de cours d’initiation à l’informatique à l’ex-INSET.
C’est ainsi
qu’après mon diplôme d’ingénieur en Génie Electrique à Rouen j’ai fait un mastère
en Réseaux télécoms a l’Institut National des télécommunications à Evry Dans le
sud de Paris.
Même si son
parcours semble s’être dessiné facilement, c’est à force de persévérance et de
courage qu’il a pu se faire une place dans ce milieu dans lequel il n’était pas
forcément favori. En Europe il fallait batailler très fort en tant qu’étranger et
Africain pour faire partie des élites et accéder aux grandes écoles
d’ingénieurs, d’autant plus qu’il y avait un quota pour les étrangers. Pendant
mon master en Réseaux télécoms, j’ai eu l’opportunité de faire un stage d’un an
chez Alcatel à Vélizy dans le sud de Paris dans le département Réseaux ATM
hauts débit suivi d’un contrat à durée déterminée d’un an.
UN
NOUVEAU DEPART
Mais sa
volonté d’apprendre et de s’ouvrir à d’autres horizons le pousse à tenter
l’aventure canadienne. « Pendant mon contrat, j’ai entrepris des démarches
d’immigration au Québec au Canada. A la fin de mon contrat je devais choisir entre
revenir en Côte d’Ivoire ou aller au Canada. Et un de mes oncles m’a dit ceci :
La Côte d’Ivoire est ton pays, tu pourras toujours revenir quand tu le
souhaites. Va chercher de l’expérience et reviens plus tard le partager avec
tes frères ivoiriens. J’ai trouvé ce conseil très sage et j’ai immigré au
Canada. A mon arrivée à Montréal au Canada j’ai continué à travailler dans mon
domaine en Télécommunications à Nortel Télécoms à Montréal », confie-t-il.
A la faveur
de la crise dans le secteur des télécommunications en 2001, le groupe UBISOFT
décide d’élargir ses activités en se lançant dans la conception de jeux en
réseaux. C’est un nouveau tournant dans sa carrière. « Avec mon expérience
en réseaux télécoms, je me suis retrouvé du jour au lendemain dans ce monde du
divertissement que je ne connaissais pas du tout. J’ai donc commencé à
travailler dans le groupe technologie comme programmeur logiciel en réseaux.
Ceci m’a mis tout de suite en contact avec plusieurs grands acteurs et j’ai
commencé à voyager en Asie pour faire connaitre notre logiciel et former les
ingénieurs à l’intégration de notre module dans les jeux de UBISOFT »,
poursuit Emmanuel Yao.
L’aventure
commencée à distance va s’accentuer, après un certain temps de collaboration. « UBISOFT
SHANGAI m’a fait une offre, celle de venir travailler à Shanghai pendant 2 ans comme
Leader Online. De la Chine, je me suis donc retrouvé à UBISOFT Singapour où
j’ai commencé comme Technical Operation Lead. Après ce projet je travaille en
ce moment sur notre jeu de réseaux comme Producteur Associé », se souvient
Emmanuel.
« Mais
ce n’est pas aisé de vivre tous ces changements, surtout quand l’on est
confronté en permanence à des cultures différentes. Ce n’est pas toujours
facile de s’adapter mais je crois qu’il y a plus de positif dans chaque
rencontre. Dans mon travail le défi quotidien est de produire des jeux de
qualité avec des personnes de formation et de culture différentes en respectant
nos cahiers de charge et délai de livraison du produit. Dans nos différences
nous avons néanmoins des similitudes. Ça me rappelle une anecdote, lors de mon
tout premier à Séjour en chine en 2007, la demoiselle dépêchée pour
m’accueillir à l’aéroport a failli s’évanouir quand elle a vu débarquer et
s’avancer vers elle avec un grand sourire un Noir. En effet, elle pensait venir
accueillir un Chinois Yao et non un Africain, c’était assez marrant. Ma famille
et moi, partout en Asie sommes confrontés à cette réaction de surprise, tantôt
avec les chauffeurs de taxi et même des collègues qui au départ m’écrivent en
chinois. En passant, je joue le jeu car je parle aussi le chinois »,
dit-il.
L’AFRIQUE
POURQUOI PAS ?
L’opportunité
du reportage que lui a consacré France 24 a été, l’occasion de se faire
connaitre par ses pairs ; une sorte de reconnaissance de son travail, qui fait
de lui une fierté pour son pays et son continent. Mais surtout un modèle de persévérance
et de détermination pour les plus jeunes. Il faut que la jeune génération sache
qu’elle a accès de nos jours a des informations que nous n’avons pas eu la
chance d’avoir en notre temps. L’internet qui a révolutionné le monde, est une
grande bibliothèque disponible pour tous.
Donc la
connaissance est présente. Il faut maintenant savoir l’exploiter en fonction de
son rêve. Il faut du courage et de la volonté pour réaliser ses rêves. Rien
n’est Simple, C’est normal d’échouer quelque fois en cours de route, on doit apprendre
de nos erreurs et construire le succès de demain.
Si cette
jeunesse a pris conscience de son rôle dans le devenir de ce continent qui nous
est cher, elle a besoin de s’appuyer de formation et de coaching. Ma plus
grande réalisation serait de mettre à la disposition de mes jeunes frères et sœurs
ivoiriens voire africains mes connaissances et leur donner des conseils. La
conception des jeux vidéo en Afrique n’existe pratiquement pas tandis
qu’ailleurs dans le monde (en Asie, en Europe, en Amérique), les jeux vidéo constituent
une industrie en plein essor, générant plus d’argent que le cinéma. Pourquoi
est-ce que l’Afrique doit être en marge de cette opportunité ?
« Alors
si je peux aider mon pays mon continent à prendre un envol dans ce domaine je
serai plus que ravi et honoré », résume-t-il.
La rédaction