Des femmes et des Omelettes est un recueil de 19 nouvelles dans lequel Awaba, jeune écrivaine vivant à Abidjan, aborde différents thèmes quotidiens de sa société. Racontée avec une pointe d’humour, la vie de tous les jours y est dépeinte avec ses couleurs vives ou sombres.
Dès la
première nouvelle, intitulée Sur la tête de mon père, le décor est planté : le
jeune Pape Souley va mener un combat acharné pour se sortir des griffes de la
drogue. L’auteur nous offre un beau combat de soi à soi, dans lequel Souley
joue son existence. L’excision, qui fait de nombreuses victimes sur le
continent africain, est également abordée et fustigée. Dans la nouvelle Mon
époux, sans voie, il est question de l’histoire heurtée d’un jeune marié. Ce
dernier découvre, la nuit de noces, que son épouse a été excisée. Le couple
fera face à ce drame, avec une solidarité exemplaire : il recourra à la
chirurgie pour « réparer » le mal et avoir une vie et une sexualité normales.
Awaba, qui
signe ce croustillant recueil de nouvelles, examine aussi des travers de la
société devenus, hélas, si courants, si banals. La pédophilie, en ces moments
de « mariage pour tous », appelle son regard dans Mon tonton gâté. Ce récit met
en avant un monsieur serviable, aimé de tous, mais dont la grande faiblesse est
d’avoir des penchants de pédophile. L’adultère - cette forme de prostitution
moderne - et ses corolaires de maux et de souffrances au sein des foyers,
n’échappent pas à son jugement. Ainsi, dans Le mari de ma meilleure amie,
l’auteur s’empare de ce sujet qui froisse les relations entre des amies.
L’une des
meilleures nouvelles de ce recueil est Ma fille à passe-passe. Le récit, ici,
met en situation Eugénie, une fille brillante et studieuse, dont le destin, qui
semblait tout tracé, va basculer : elle plonge dans l’enfer de la prostitution
lorsque son père décède.
Pour donner
du souffle à ces sujets délicats, Awaba habille d’une pointe d’humour ses
récits. Cela donne incontestablement un plus à ce recueil qui se laisse lire.
Le lecteur peut alors s’arrêter, aisément, sur plein d’autres histoires dont
les MST (Maladies sexuellement transmissibles), le célibat heureux dans une
Afrique qui a tendance à idéaliser le mariage, le phénomène «nappy», les
superstitions, la religion et ses mystères, les TIC (Technologies de
l’information et de la communication) qui empêchent le dialogue fluide entre
les parents et enfants…
Avec peu de
narration, peu de personnages, des suspenses, des fulgurances, des
retournements inattendus, Awaba fait montre de sa parfaite maîtrise de
l’écriture de la nouvelle et de ses principales règles. Sa plume arrive ainsi à
conduire le lecteur sur des chemins fictifs, puis à le faire basculer dans une
réalité toute autre à la fin.
Après
Affres, hics d’aujourd’hui, son premier recueil de nouvelles publié chez
NEI-CEDA en 2013, Awaba confirme son talent de nouvelliste avec Des femmes et
des Omelettes. Elle peut, à présent, se lancer dans un projet plus ambitieux
comme l’écriture d’un roman où la narration autorise la multiplicité des
intrigues et des péripéties. Pour sûr qu’elle offrira encore du plaisir à ses
lecteurs.
À très bientôt avec un ouvrage tout aussi palpitant !