Dans ce roman destiné aux jeunes, et qui a obtenu le Prix d’Excellence Charles Bauza Donwahi 2018– Catégorie Lycée, l’auteur invite le lecteur à une véritable prise de conscience des conséquences négatives des grossesses précoces en milieu scolaire.
Fatou Fanny-Cissé campe l’histoire de trois amies inséparables, Maeva, Carine et Oumou. Élèves en classe de troisième, les trois jeunes filles partageaient un rêve commun : devenir médecin. Maeva rêvait de se spécialiser en pédiatrie, Oumou en chirurgie et Carine en gynécologie. Sans être des surdouées en classe, elles avaient toutes les chances de réaliser leur rêve. Elles avaient des notes correctes en classe, des parents qui subvenaient à leurs besoins, et étaient entourées, à quelques différences près, de beaucoup d’affection. Elles n’auront pourtant pas le même destin.
La vie a ses
propres scénarios et le Tout-Puissant n’a pas créé les Hommes égaux. Ce qu’Il
prévoit comme joie pour l’un, il ne le réserve pas au même volume pour l’autre.
Ce qu’il prévoit comme peine pour l’un, Il le multiplie ou l’atténue
complètement pour l’autre. Il fait ce qu’Il veut, quand cela lui plaît. Et
c’est ce qui fait
Sa grandeur.
Cette leçon de vie, Oumou et Carine l’apprendront à leurs dépens, puisqu’elles
emprunteront une toute autre trajectoire.
Dans ce
roman jeunesse bien mené, on entend parfois des notes de musique bien rythmées,
et c’est avec le titre Bazardée de Keblack que l’ONG Avenir des Jeunes
sensibilise ceux-ci sur les risques encourus lors des grossesses précoces : ne
croyez surtout pas, chères jeunes filles, que nous cherchons à vous
emprisonner, insista la présidente de l’ONG, car il faut que jeunesse se fasse.
Mais nous voulons vous éviter des surprises désagréables qui pourraient avoir
des conséquences fâcheuses et désastreuses sur votre vie.
Elles
étaient jeunes, elles étaient belles, elles étaient dans la fleur de l’âge.
Telles des étoiles au firmament, elles feront immanquablement l’objet de toutes
les convoitises.
Bien que
très amies, se confiant l’une à l’autre, elles ne résisteront pourtant pas de
la même façon aux assauts de la gente masculine. Oumou s’entichera d’un jeune
homme de son âge qu’elle rencontrera à la faveur des jeux inter-écoles
organisés par son établissement scolaire. Il la couvrait de compliments et cela
lui a suffi pour faire le grand saut avec ce dernier. Elle le rencontrait à
l’insu de ses parents pourtant très sévères et pieux. Elle usait de stratagèmes
pour tromper leur vigilance : camouflage de ses habits très sexy à l’aide de
boubous et de pagnes, invention de séances de révision des cours avec ses
meilleures amies…
Ce qui
devait arriver arriva. Oumou tomba enceinte sans même en prendre conscience.
Interrogée par sa mère, elle avoua, non sans difficultés, rencontrer
régulièrement un jeune élève de qui elle était profondément éprise. Furieux,
son père alla à la rencontre des parents du jeune indélicat qui avait osé lui
faire un tel affront. Mais le coupable, effrayé par la réaction de ses parents,
refusa catégoriquement de reconnaître la grossesse de Oumou, prétextant la
connaître vaguement et, surtout, ne jamais avoir eu de relations sexuelles avec
la malheureuse. Oumou fut donc contrainte d’être la quatrième épouse de tonton
Youssouf, un ami de son père qui vivait à l’intérieur du pays et n’arrêtait pas
de lorgner ses formes généreuses à chaque fois qu’il venait à la maison.
Carine,
attirée par le matériel, se détournera également du bon chemin. Malgré son
jeune âge, elle n’hésitera pas à avoir deux amants plus âgés qu’elle pour
subvenir à ses nombreux besoins. L’un lui offrant les chaussures de luxe que
son maigre argent de poche lui interdisait, elle le surnomma « Chaussure ».
Quant à
l’autre, « NTIC », il était son fournisseur en téléphones portables de dernière
génération. Les deux hommes étaient mariés mais ceci ne gênait en rien Carine.
Bien au contraire, cela lui permettait de mieux manœuvrer ses deux amants. Mais
quelle ne fut sa surprise quand la femme de « NTIC », accompagnée de ses
filles, lui rendit une visite très peu amicale : sans autre forme de procès, la
dame et ses filles se jetèrent sur Carine à qui elles assénèrent de violents
coups sur le corps et des gifles retentissantes au son de voleuse de mari.
Après cette déconvenue devant sa maison, Carine prit de nouvelles résolutions :
ainsi Carine avait-elle fait le choix de changer de style de vie et de se
consacrer désormais entièrement à ses études. Mais malgré toutes ses bonnes
résolutions, Carine n’allait-elle pas quand même être rattrapée par son passé ?
Car le ver était déjà dans le fruit
L’auteur
questionne également le rôle des « faiseuses d’anges », celles qui ôtent la vie
à des bébés logés confortablement dans le sein de leurs mères.
De ces trois
amies inséparables, seule Maeva réussira à réaliser son rêve, celui de devenir
pédiatre, non pas parce qu’elle était la plus brillante ou la moins désirée par
les jeunes de son âge, mais parce qu’elle a su attendre le bon moment. Elle a
su mettre à profit les conseils avisés de sa mère dont elle était très proche.
Fatou
Fanny-Cissé a commencé à écrire en 1999. Durant sa carrière (1999 – 2018), elle
a publié une dizaine d’ouvrages pour adultes et pour enfants parmi lesquels : -
Madame la Présidente, Nei-Ceda Éditions, 2016 : Prix AECI (Association des
écrivains de Côte d’Ivoire) 2017 du meilleur livre féminin, Prix du meilleur
livre de fiction de l’année - Ala 2017 ; - Les nuages du passé, Cercle Éditions,
2016 : Prix d’Excellence Charles Bauza Donwahi 2018 – Catégorie Collège.
Avec Maeva,
Fatou Fanny-Cissé dénonce les grossesses précoces et leurs nombreuses
conséquences négatives dans la vie de ces mamans qui ne sont encore que des
enfants. En outre, elle situe les responsabilités des uns et des autres pour parer
à ce fléau récurrent dans notre société. Dans un style dépouillé et accessible
à tous, et avec une pointe d’humour remarquable, l’auteur nous conduit dans les
méandres de la vie de trois jeunes amies.
Maeva de
Fatou Fanny-Cissé, un livre à lire et à faire lire à nos enfants, surtout à nos
filles qui rêvent trop tôt au prince charmant.
Isabelle Kassi
Fofana (directrice générale Massaya Editions)