De plus en plus de parents cherchent à établir une relation de proximité avec leurs enfants. On veut qu’ils nous fassent confiance, qu’ils se confient sans peur, qu’ils se sentent bien chez eux. Et dans cet élan, une question revient souvent : est-ce qu’on peut, ou doit, être ami avec son enfant ?
À première vue, l’idée est séduisante. Mais derrière cette aspiration à la complicité, se cachent des enjeux plus complexes. Être parent, ce n’est pas tout à fait comme être un copain.
L’envie de complicité
: une aspiration légitime
Évidemment, tout parent rêve de partager des fous rires avec son enfant,
d’avoir des discussions profondes, de créer une vraie proximité. On veut être
là, disponibles, à l’écoute. Et il faut le dire : cette complicité, quand elle
existe, est précieuse. Elle permet à l’enfant de se sentir en sécurité
émotionnelle, valorisé, compris.
Rire ensemble, s'intéresser à son monde, écouter sans juger : ce sont des
gestes essentiels pour construire une relation forte. Et oui, cela ressemble
parfois à une amitié. Mais ce n’en est pas une.
Être parent, ce n’est
pas être égal
Un parent n’est pas un pair. Il n’a pas le même rôle, ni la même posture.
Et c’est justement ce décalage qui est structurant pour l’enfant.
1.
Un cadre, pas juste une présence : Un ami ne
fixe pas de règles. Il n’impose pas d’heures de coucher ou de limites sur
l’usage du téléphone. Mais un enfant a besoin de ce cadre pour se construire.
Il a besoin de sentir qu’un adulte prend la responsabilité de dire non quand
c’est nécessaire.
2.
Un repère solide : Quand un enfant est
perdu, ce n’est pas un ami qu’il cherche. C’est un adulte stable, qui tient bon
même dans la tempête, qui prend des décisions difficiles quand il le faut. Être
aimé, ce n’est pas toujours dire oui.
3.
Des rôles bien définis : Quand les
frontières sont floues, ça déstabilise l’enfant. Si le parent cherche à tout
prix à être aimé ou à éviter les conflits, il peut finir par se faire manipuler
ou, à l’inverse, par mettre sur les épaules de son enfant un poids émotionnel
qu’il ne devrait pas porter.
4.
Laisser l’enfant vivre sa vie sociale : Un enfant a
besoin d’amis de son âge, avec qui tester les règles sociales, se fâcher, se
réconcilier, grandir. Si le parent prend cette place, il peut involontairement
empêcher ces expériences nécessaires.
Trouver un équilibre :
ni copain, ni autoritaire
Alors, faut-il renoncer à toute forme de complicité ? Bien sûr que non. Ce
n’est pas une opposition entre autorité et affection. C’est une question de
posture juste.
On peut être un parent complice, un adulte présent, aimant et
respecté, sans devenir le “meilleur pote”. Cela passe par :
- Affirmer son rôle d’adulte : C’est vous le
parent. Ce n’est pas négociable. Vous posez le cadre, vous prenez les
décisions difficiles, vous êtes le filet de sécurité.
- Entretenir la proximité : Écoutez
sincèrement, soyez curieux de leur monde, riez avec eux. Montrez que vous
êtes là, pas seulement pour surveiller, mais pour partager.
- Dire non quand c’est nécessaire : Avec fermeté
mais sans brutalité. Les enfants ont besoin de limites, mais surtout de
comprendre qu’elles viennent d’un amour exigeant, pas d’un désir de
contrôle.
- Respecter leur individualité : Ce sont des
personnes à part entière, pas des copies de vous, ni des projets à réussir.
- Montrer l’exemple : Vos actes parlent plus fort que vos discours.
Montrez-leur comment on traverse les conflits, comment on gère les
émotions, comment on assume ses erreurs.
Au fond, la relation parent-enfant est quelque chose d’à part. Ce n’est ni
une hiérarchie autoritaire ni une camaraderie entre égaux. C’est une alliance
inégale mais profondément aimante, dans laquelle l’enfant peut grandir en
sécurité parce qu’il sait que quelqu’un veille, tient la barre, et l’aime sans
condition.
Vouloir être proche de son enfant, c’est beau. Mais ce qu’il attend surtout
de vous, ce n’est pas que vous soyez son ami, c’est que vous soyez son parent –
et que vous le restiez, même quand ce n’est pas simple.