Dans un monde de plus en plus fertile à l’éclosion des graines de la xénophobie, de l’extrémisme et du fanatisme religieux, où l’intolérance est érigée en reine sur le trône des relations humaines, la paix, la stabilité et la cohésion sociale apparaissent parfois à bien des égards comme des horizons qui restent à l’horizon.
Là où il
faut construire des ponts de sympathie entre les peuples, l’intolérance
véhiculée par certaines idéologies s’est toujours offert la faim vorace de ravager
les frêles semences de la richesse que la terre de la différence enfante. Et
pourtant, comme le disait Saint EXUPERY :
« Si tu diffères de moi, loin de me léser, tu
m’enrichis ». La compréhension et l’application de certaines idéologies ont
fini par engendrer chez une poignée d‘individus, des attitudes peu orthodoxes,
parfois aux antipodes des fondamentaux véhiculés par les systèmes et modes de
pensée qu’ils disent incarner. Il en est de même pour les religions dites
monothéistes ou non. On note ainsi depuis ces dernières décennies, la floraison
de groupes terroristes nébuleux, baptisés ou supposés « djihadistes », et qui
fait de l’Islam, une religion cataloguée comme étant la mamelle nourricière de
l’Intolérance et du fanatisme.
Eloquence
des faits, ou bile de crocodile à ingurgiter ? L’Islam en tant que dogme, mode
de pensée, de philosophie et de vie comportementale offre-t-il le flanc à
l’intolérance, ou constitue-t-il simplement l’anse du fanatisme ? Les « Allahou
Akbar !» qui seraient lâchés par des kamikazes lors des opérations terroristes
ou supposées « djihadistes », ne sont-ils pas des cris de guerre assez
révélateurs de la dimension autarcique de cette religion où l’acceptation de
l’autre n’est qu’un leurre, ou sont-ils simplement étrangers aux valeurs qui y
sont vulgarisées ?
Les textes
et les faits parlent suffisamment, et il faut certainement les disséquer pour
lever, s’il y a lieu, toutes les équivoques possibles.
DES SOURCES
QUI PARLENT D’ELLES-MÊMES
Si la
déclaration de l’Unesco sur la tolérance en date du 16 novembre 1995, les
enseignements islamiques portent sur eux, le poids de l’âge de plus d’un
millénaire. Et il n’existe la moindre ombre de doute à la taille d’un atome sur
la flexibilité et la largesse de l’Islam, quant à sa force à garantir et
entretenir la tolérance entre les membres de la commune humanité.
Sur la base
des textes de référence, le fanatisme est proscrit non seulement envers les
musulmans, mais aussi envers les adeptes des religions monothéistes et des
polythéistes.
LES RAPPORTS ENTRE MUSULMANS ET POLYTHEISTES
Le Saint
Coran comporte plusieurs niveaux de révélation. Certes, la plupart des
prescriptions juridiques font peser des obligations sur les musulmans, mais il
existe aussi des principes et valeurs universels à l’attention de l’humanité toute
entière. Et ces principes prennent en compte toutes les croyances, les
idéologies, les formes de pensée et de conviction.
Principalement,
l’Islam est venu restaurer la véritable culture du monothéisme pur, galvaudé
sur fond de croyance saugrenue et paganiste, et rendre au SEIGNEUR, Sa part de Gloire
en tant que Maître et Créateur de l’Univers, Maître du jour de la Rétribution.
L’Islam
combat ainsi le polythéisme, mais dans le respect de ses adeptes. La force de
conviction du rétablissement de cette longue tradition monothéiste n’autorise
guerre le musulman à marginaliser les polythéistes, ni à avoir envers eux, des
attitudes déloyales et le Coran interdit formellement d’injurier les divinités
des polythéistes : « N’insultez pas ceux qui adorent d’autres divinités en
dehors d’Allah, car suite à cela, leur ignorance pourrait les amener à vouloir
se venger en insultant Allâh… » S 6 V 108
Le Coran
invite le musulman à s’adresser aux autres avec douceur et sagesse : « Par la
sagesse et la bonne exhortation appelle (les gens) au sentier de ton Seigneur.
Et discute avec eux de la meilleure façon. Car c’est ton Seigneur qui connaît
le mieux celui qui s’égare de Son sentier et c’est Lui qui connaît le mieux
ceux qui sont bien guidés. » S 16 V 125.
Ces
différentes exhortations épousent la lettre et l’esprit d’un principe universel
fondamental de la liberté et des droits de l’homme, à savoir celui de la
liberté de culte et d’opinion. Le Coran déclare : « Qu’il n’y ait pas de contrainte
dans la religion, la Vérité se distingue par elle-même de l’Erreur ; celui qui
rejette le mal et croit en Dieu saisit une poignée solide qui ne se brise
jamais. » S 2 V 256
Mieux, il
fait du respect de l’homme, sans coloration raciale, ethnique et religieuse,
une condition sine qua none de quête de l’agrément divin : « O hommes, craignez
votre Seigneur Qui vous a créés d’une seule Personne… » S 4 V 1.
La notion de
crainte de DIEU ici évoquée est définie par les savants musulmans comme étant
la conscience permanente de la présence divine. Une sorte d’immersion et
d’harmonie avec la divinité qui n’est possible que dans la considération accordée
à l’homme en tant que fruit de la Miséricorde divine.
Et le
Messager d’ALLAH (saw) le disait avec charme : « Celui qui veut que Le SEIGNEUR
Qui est là-haut lui fasse Miséricorde, qu’il fasse Miséricorde à ceux qui sont
sur la terre et qui sont les fruits de la Miséricorde de Celui Qui se trouve
là-haut ».
Le Prophète
Mouhammad (saw) interdisait à ses proches compagnons d’être désobligeants à
l’endroit des polythéistes et leur accordait la bienveillance requise. Tout le
soin et le respect réservés à son Oncle Abu TÔLIB jusqu’au décès de celui-ci
est une preuve parmi tant d’autres. Il le vénérait comme son propre père,
nonobstant son refus d’embrasser l’Islam.
L’Islam
garantit cette même ouverture et largesse à l’endroit des gens du livre.
LES RAPPORTS ENTRE MUSULMANS ET ADEPTES DES RELIGIONS MONOTHEISTES
Les savants
et historiens musulmans ont tous attesté de la véracité de ces dires du
Messager d’ALLAH saw : « Celui qui fait du mal à un Juif ou à un Chrétien trouvera
en moi son adversaire au Jour du Jugement ».
Lorsque,
pour la première fois, il recevait l’Ange Gabriel, pétrifié par sa Grandeur, il
avait fui la grotte de la montagne de Hira où il était en retraite spirituelle
pour retrouver son épouse Kadidja (que ALLAH l’agrée). C’est auprès de l’oncle de
cette dernière, dénommé Waraqa, qui était un érudit chrétien, qu’il prit
conseil, et qui l’informa sur le fait que ce signe ne pouvait que témoigner de
son choix en tant que dernier Messager venu clore le cycle prophétique.
Jamais dans
ses rapports avec les chrétiens et les juifs, il n’a trahi son serment, ses
engagements et tous les traités de paix et de coopération.
C’est sur la
base de cette franche communion que, dès les premières heures de persécution
des musulmans, il leur demanda de se réfugier en Abyssinie où régnait « un roi
chrétien juste », avait-il soutenu. Et quand, plus tard, une délégation de Chrétiens
d’Abyssinie vint à Médine, c’est dans la Mosquée, le lieu de culte des
musulmans qu’il leur accorda accueil, gîte et nourriture. C’est ainsi qu’il
accorda une partie de l’intérieur de sa Mosquée à une délégation de Chrétiens
venus de Najran, une ville du Sud-ouest d’Arabie pour l’exécution de leurs
prières.
Ces
compagnons immédiats ont dès lors pratiqué ces mêmes valeurs d’ouverture. Et
c’est pour cela que l’un de ses successeurs, le Khalife OUMAR (raa) refusa de
prier à l’intérieur de la principale Église de Jérusalem à la demande de ses dignitaires,
lorsqu’il libéra cette contrée de l’occupation byzantine, alors qu’il était
l’heure de la prière musulmane. Il avait dit craindre que, par ce geste, les
générations futures ne viennent transformer ce lieu en Mosquée, par devoir de
mémoire de l’histoire.
Pour
l’Islam, toutes les religions monothéistes sont tirées de la même
substantifique moelle et exigent le même regard et égard. Les ajouts et les incompréhensions
ne viennent que des hommes imparfaits et non des révélations complètes et parfaites
: « Il vous a légiféré en matière de religion, ce qu’Il avait enjoint à Noé, ce
que Nous t’avons révélé, ainsi que ce que Nous avons enjoint à Abraham, à Moïse
et à Jésus : « Etablissez la religion ; et n’en faites pas un sujet de
divisions… » S 42 V 13 «…Nous n’établissons pas de distinction (disent-ils) entre
l’un ou l’autre de ses Messagers… ‘‘nous’’ écoutons et nous obéissons…» S 2 V
285.
Qu’aujourd’hui,
dans certains pays dits musulmans, des minorités juives ou chrétiennes soient marginalisées
et que leurs droits soient bafoués et piétinés, cela ne résulte que de
pratiques elles-mêmes marginales qui n’ont aucune source légitime, suivant
l’exemplarité comportementale du Prophète Muhammad (saw) dans le traitement accordé
aux minorités pendant son apostolat. Tout acte injuste ou terroriste à
l’endroit des adeptes de toute autre religion ne relève que du fanatisme qui n’a
sa source que dans l’ignorance, la cupidité et l’instrumentalisation politique.
Dire tuer au
nom d’ALLAH, est l’un des crimes les plus odieux qu’ALLAH Lui-même s’est porté
Garant de punir le jour de la résurrection : « …Quiconque tuerait une personne
non coupable d’un meurtre ou d’une corruption sur la terre, c’est comme s’il
avait tué tous les hommes. Et quiconque lui fait don de la vie, c’est comme
s’il faisait don de la vie à tous les hommes… » S 5 V 32 « Quiconque tue intentionnellement
un croyant, Sa rétribution alors sera l’Enfer, pour y demeurer éternellement.
Allah l’a frappé de Sa colère, l’a maudit et lui a préparé un énorme châtiment.
» S 4 V 93. Certains actes fanatiques sont aussi visibles à l’intérieur de la
communauté musulmane.
LES RAPPORTS ENTRE MUSULMANS ET MUSULMANS
Au nom de
l’ignorance et du fanatisme, la femme a été réduite au rang de sous-homme dans
certaines contrées où l’Islam est la religion dominante. Par le truchement des
clichés culturels, la femme est reléguée en arrière-plan, alors que l’Islam a
proclamé sa dignité en tant qu’être à part entière et non entièrement à part,
jouissant de tous les droits possibles qui restituent toute la plénitude de son
humanité et de sa dignité.
On le voit,
elle est dépossédée de ses biens, privée d’héritage, parfois forcée au mariage,
des attitudes exactement aux antipodes des recommandations islamiques et de la
pratique du Prophète Mouhammad (saw). Ce même fanatisme qui fait que certains musulmans
s’entretuent au nom de leur divergence idéologique, comme on le voit sous
d’autres cieux, dans la guerre entre Sunnites et Chiites, deux courants
doctrinaux qui revendiquent tous à la base, la croyance en UN SEUL DIEU.
Ce fanatisme
est visible à l’intérieur d’un même courant doctrinal où certains se diront
plus musulmans que d’autres, jugeant, condamnant, comme les détenteurs des clés
du paradis et de l’enfer.
Et pourtant,
tout ceci est formellement proscrit par l’Islam : « Les croyants ne sont que
des frères. Etablissez la concorde entre vos frères et craignez ALLAH, afin
qu’on vous fasse miséricorde... »
« Ô vous qui
avez cru ! Qu’un groupe ne se raille pas d’un autre groupe : ceux-ci sont
peut-être meilleurs qu’eux… » S 49 V 10-11
Dans le
fond, le fanatisme n’est d’aucune religion. Il n’a de religion que l’ignorance
aveugle, la manipulation servile à des desseins politiciens ou inavoués.
L’une des
premières Constitutions les plus modernes de l’humanité à mettre en place les
fondations d’une nation unique, où la diversité faisait la richesse et où les
musulmans, les juifs, les chrétiens et les idolâtres jouissaient de la même
protection et de la même sécurité, a été celle de Médine.
L’Islam n’a
jamais été une religion à géométrie variable, soufflant entre le chaud et le
froid. Et le Coran nous ramène sans cesse à l’essentiel des valeurs qui
fédèrent toutes les croyances et les convictions dans le même moule : « Ô
hommes ! Nous vous avons créés d’un mâle et d’une femelle, et Nous avons fait
de vous des nations et des tribus, pour que vous vous entre-connaissiez. Le
plus noble d’entre vous, auprès d’Allah, est le plus pieux… » S 49 V 13
Le fanatisme
restera toujours étranger aux savoureux enseignements de cette religion, et son
éradication reste d’ailleurs tributaire de certains préalables, tels
l’éducation, la formation, la justice, la prise de conscience individuelle, la
sensibilisation, la bonne connaissance et pratique de la Religion. Et le
Messager d’ALLAH (saw) avait raison de le dire : « l’ignorance est un péché ».
Savoir, éloigne des réactions à fleur de peau et réconcilie avec l’essentiel des valeurs morales, intellectuelles et spirituelles. Islam et fanatisme sont ainsi, deux notions diamétralement opposées, l’une (l’Islam), offrant la substance médicamenteuse pour soigner l’autre (le fanatisme), un cancer areligieux dans le cœur de ceux qui le portent.
El Hadj Dibaté Fousséni (journaliste-écrivain)